SUCCESS-STORY: Le «chèque santé», afin qu'aucune femme ne meure en donnant la vie (2)

 Trois ans après son lancement, en 2015, le programme, co-financé par le C2D et la KFW, a atteint ses objectifs.

Le 02 juin 2015 fut un grand jour pour Awah, modeste habitante de Ngaoundéré. Ce matin-là, comme de nombreuses autres femmes de la ville et même de la région de l'Adamaoua, elle s'était levée particulièrement de bonne heure. Pour la journée, Awah et ses voisines avaient mis leurs vêtements les plus chics. Leurs sourires, qui rivalisaient d'éclat, témoignaient de la joie et de l'excitation qui les animaient.

Par petits groupes, Awah et ses voisines avaient envahi la cour de l'hôpital régional de Ngaoundéré. Elles ne furent pas étonnées par l'effervescence particulière qui régnait en ces lieux. Le soleil avait pris rendez-vous avec les populations, et déjà les groupes de danses et de chants donnaient une solennité certaine à l’événement. La cour principale de l'officine publique débordait de monde. Ce 02 juin-là, elle avait fait sa plus belle toilette pour accueillir la cérémonie de lancement du «chèque santé», le premier qu’Awah et ses voisines allaient toucher de leur vie.

Trois ans après ce lancement, nous sommes revenus à Ngaoundéré. Nous n'avons pas retrouvé Awah. Et nous avons aussi rencontré Josianne, Maimouna et Aichata, des femmes qui, comme Awah, ont bénéficié du chèque santé. C'est au centre de santé de Dang, à Ngaoundéré, que les trois femmes ont livré leurs témoignages émouvants sur cette formidable initiative. Josianne est la première à s'exprimer : «Grâce au chèque santé, j'ai bénéficié d'une prise en charge totale et de la gratuité des soins pendant ma grossesse. J'ai pu accoucher sans souci, et je remercie le gouvernement d'avoir pensé aux femmes enceintes. Le chèque santé est une excellente initiative.»Maimouna n'en pense pas moins, et elle le clame: «Avec le chèque santé, j'ai réalisé mes 4 visites prénatales gratuitement. Au-delà, l'équipe nous a prodigué des conseils pour mieux gérer nos grossesses. Sans le chèque santé, je n'aurai pas eu assez d'argent pour supporter toutes ces dépenses.»Le mot de la fin revient à Aichata. Encore toute émue elle déclare : «Avec le chèque santé, j'ai eu une grossesse tranquille, sans stress. J'ai pu faire mes visites prénatales et accouché dans les meilleures conditions. Le chèque santé est véritablement la solution pour la femme enceinte

Au centre de santé de Dang, du lamidat en passant par Sabongari, Bamnyanga ou Nord Cifan, les femmes enceintes, munies de leur chèque santé, véritable sésame, défilent tous les jours pour bénéficier des services qui y sont attachés. Comme Aichata, Josianne ou Maimouna, elles sont nombreuses, 33.168.000 au total, à bénéficier du chèque santé et à conduire leurs grossesses en toute tranquillité et sérénité. Grâce au chèque santé, le gouvernement camerounais a engagé un véritable combat pour la réduction de la mortalité maternelle, infantile et néonatale, afin qu'aucune femme ne meure en donnant la vie et qu'aucun bébé ne perde la vie avant même d'avoir vécu.

Dans la région de l’Adamaoua, par exemple, les statistiques sont positives, ainsi que l'explique le chef de projet chèque santé dans la région : «Avant le lancement du programme, l'on enregistrait près de 1000 décès pour 100.000 accouchements. Grâce au chèque santé, seulement 69 décès ont été enregistrés pour 23.000 accouchements, soit une réduction de plus du tiers de la mortalité maternelle. Pour ce qui est des enfants, seuls 155 décès ont été enregistrés sur les 23.000 naissances, soit moins de 1% de décès.» Au total, dans les trois régions (Adamaoua, Nord et Extrême-Nord) couvertes par le programme, 86.106 chèques santé ont été vendus. Ils ont permis de réaliser plus de 193.267 consultations prénatales pour 59.286 accouchements. 97 décès de femmes et 369 décès de nouveaux nés ont été enregistrés.

A la lumière de ces chiffres, on peut le reconnaître : le projet a atteint ses objectifs et est même est allé au-delà des espérances. Pour le coordonnateur régional du projet dans l'Adamaoua, «le chèque santé a clairement permis de faire reculer la mortalité maternelle et infantile. Il a, en outre, permis de renforcer systématiquement l'information sanitaire. Avant, il y avait très peu de données disponibles sur les naissances. Aujourd'hui, l'information sanitaire est disponible et permet de prendre les bonnes décisions. Grâce à cette information, une passerelle fiable peut être créée par exemple avec les programmes de planning familial. Le chèque santé permet d'entrevoir un avenir meilleur pour la femme enceinte. C'est une initiative à étendre.»

Le projet chèque santé a pour objectif de contribuer à la lutte contre la mortalité maternelle et infantile, particulièrement élevée dans la partie septentrionale du pays où la quasi-totalité des accouchements s’effectuait jusque-là à domicile, et les visites prénatales presque inexistantes. Le concept est bâti sur un modèle de subvention des dépenses sanitaires allant de quatre visites prénatales à une période d’observation de 40 jours après l’accouchement. Il est destiné à réduire les barrières financières d’accès aux soins obstétricaux et néonataux. Toutes les prestations sont offertes aux femmes enceintes, grâce à l’acquisition d’un chèque de 6000 FCFA pour un accouchement normal. Avec cette contribution, la femme enceinte reçoit un chèque santé lui donnant accès, pendant sa grossesse, aux consultations et examens nécessaires à un accouchement par voie normale ou césarienne, par un personnel qualifié. Il a été financé par le contrat de désendettement et de développement (C2D) et la KreditanstaltfürWiederaufbau (KFW, coopération allemande), à hauteur respectivement de 23 et 14,7 milliards de FCFA, dans le cadre d’un programme conjoint. La phase pilote de 3 ans étant achevée, le projet est en cours de transfert.

 

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